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Transfert intergénérationnel d’entreprise : le changement de janvier 2024 (et pourquoi c’est important !)

Écrit par Mathieu Therrien  - 

Depuis plusieurs années, les entrepreneurs à la tête d’entreprises familiales avaient appris et accepté qu’il serait probablement moins avantageux fiscalement de transférer leur entreprise à leurs enfants et neveux que s’ils vendaient l’entreprise à des étrangers.

La valeur de leur entreprise étant souvent une partie importante de leur épargne retraite, tous les entrepreneurs en phase de retrait ne pouvaient nécessairement se permettre d’assumer le fardeau fiscal supplémentaire associé à conserver l’entreprise dans la famille, ce qui a nécessairement amené à des décisions difficiles à travers le temps.

1. Le principe de base

Un des attributs d’une bonne planification fiscale est la réduction de l’impôt à payer par le contribuable concerné. L’optimisation des sources de revenus afin de profiter des mécanismes prévus pour ce faire est donc une tâche essentielle pour votre fiscaliste.

L’une des possibilités pour votre professionnel de la fiscalité d’y arriver est notamment de troquer du revenu d’entreprise ou de dividendes pour du gain en capital, lorsque c’est possible et que ça respecte la loi. Cette façon de faire sera particulièrement intéressante dans le cas d’une société canadienne se qualifiant de petite entreprise exploitée activement, principalement parce qu’elle permettra au particulier de profiter de la déduction sur le gain en capital, si les conditions sont remplies.

2. L’approche historique : les dérives du passé

Toujours plus créatifs et ingénieux pour leurs clients, les fiscalistes ont usé de prouesses intellectuelles et parfois conseillées des planifications agressives réalisant des transactions « artificielles » visant le seul but de générer une économie d’impôt par l’exécution de manœuvres juridiques successives au sein d’entreprises existantes. Évidemment, les autorités ont vite fait de rectifier le tir en modifiant la loi, notamment en réputant être du dividende le gain en capital réalisé lors de transaction entre personnes liées, conformément à l’article 84.1 de la Loi sur l’impôt sur le revenu. Qui dit dividende réputé dit donc également une imposition comme telle. Ainsi, pensait-on, on éviterait les déroutes et l’exploitation injuste du système, empêchant la création de faux avantages. C’est à ce moment que les transactions dans les entreprises familiales se sont compliquées, puisque les parents et leurs enfants sont par définition des personnes liées.

3. La correction : le projet de loi C-208

Avant le projet de loi C-208, un parent qui vendait son entreprise à son enfant au lieu d’à un tiers se retrouvait grandement pénalisé par une facture fiscale beaucoup plus salée.

Cela créait une injustice fiscale importante que le législateur a souhaité corriger. Depuis le dépôt du projet de loi et jusqu’en janvier 2024, les critères d’exception à appliquer se sont précisés.

Le nouveau principe se résume donc ainsi : les vrais transferts d’entreprises de parents vers leurs enfants et qui répondront aux critères ci-bas redeviennent donc pour les vendeurs et les acheteurs d’entreprises familiales des transactions qui déclenchent du gain en capital au lieu de dividendes réputés.

4. Le portrait aujourd’hui

Depuis janvier 2024, l’Agence du Revenu a précisé les conditions d’application du traitement favorable aux véritables transferts intergénérationnels à l’article 84.1 (2) e) de la Loi sur l’impôt sur le revenu.

La loi prévoit deux options, soit un transfert immédiat, sur une durée maximale de 36 mois, soit un transfert progressif, sur une durée allant de 5 à 10 ans.

  • Option 1 : Le transfert instantané (sur 36 mois)

Lors de la transaction initiale, le propriétaire doit transférer la majorité des actions comportant un droit de vote et des actions ordinaires qu’il détient à son acheteur. Il aura ensuite 36 mois pour vendre toute autre action détenue dans l’entreprise, qu’elle soit votante et participante ou non. La gestion de facto de l’entreprise doit elle aussi être transférée dans ce même délai de 36 mois de la transaction initiale, ce qui témoignera du réel retrait par le propriétaire également. Enfin, un ou des enfants doivent participer activement à l’entreprise pendant au moins 36 mois et ils devront conserver le contrôle des actions comportant un droit de vote de l’entreprise pendant 36 mois après la transaction initiale.

  • Option 2 : Le transfert progressif – sur 5 à 10 ans

Les critères sont très semblables, à savoir que le propriétaire devra, sur une durée s’échelonnant de 5 à 10 ans, transférer la majorité des actions comportant un droit de vote et des actions ordinaires qu’il détient au profit d’un ou plusieurs de ses enfants. Cet enfant devra également participer activement à l’entreprise pendant la même durée que l’échéancier de transfert et contrôler l’entreprise graduellement. Le contrôle de droit devra aussi être conservé par les enfants pendant l’échéancier de transfert, soit 5 à 10 ans.

5. Pourquoi c’est important?

Même si ces changements sont survenus il y a un moment déjà, ce ne sont pas tous les chefs d’entreprises familiales qui les connaissent. Le sachant désormais, il devient possible d’espérer transmettre à ses enfants le fruit du travail de leur vie sans nécessairement en être pour autant désavantagé indument.

Il sera très intéressant, autant stratégiquement que fiscalement, de préparer tôt un bon plan de relève de l’entreprise familiale incluant les enfants et qui permettra aux dirigeants qui se retirent de maximiser leur rendement.

Non seulement le revenu de gain en capital généré n’est pas inclus à 100 % dans le revenu imposable du particulier, mais le vendeur d’actions de société canadienne privée exploitée activement bénéficie d’un congé d’impôt grâce à la déduction pour gain en capital. Cette déduction permet actuellement, si les actions se qualifient, d’éviter d’inclure les premiers 1 250 000 $ de gain en capital dans le calcul du revenu imposable.

Ça vaut la peine d’y penser et de se préparer en conséquence. La fiscalité et les chiffres ne sont par ailleurs qu’un aspect du transfert d’entreprise parmi d’autres, ça ne vaut pas la peine de vous priver d’un appel avec nous pour vous aider à planifier la suite !

Au plaisir de vous aider bientôt !

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