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Vos clauses prévoyant des intérêts en cas de retard de paiement sont-elles valides ?

Écrit par Guillaume Demers  - 

Nous retrouvons souvent dans les contrats d’entreprises des clauses visant à prévoir un taux d’intérêt dans le cas où une des parties n’exécuterait pas son obligation, et ne paie pas le service rendu, par exemple.

Une bonne stratégie pour se financer ?

Ces clauses prévoient souvent des intérêts relativement élevés afin d’éviter que le débiteur n’aille jusqu’à décider de « se financer » en retardant volontairement ses paiements. De plus, ces clauses peuvent être accompagnées d’une clause « pénale », qui prévoit le remboursement des frais encourus dans le cas où une poursuite judiciaire serait rendue nécessaire par le non-paiement.

Il est important de savoir que la validité de ces clauses peut notamment être limitée en raison de leur caractère abusif, du contrat dans lequel elles sont contenues et de leur rédaction.

La Cour d’appel du Québec s’est penchée sur la question en 2013 dans la décision Diamantopoulos c. Construction Dompat inc., 2013 QCCA 929 . Le litige opposait un entrepreneur qui poursuivait en justice le propriétaire d’une résidence dont il avait participé à la construction. Une partie des travaux n’avaient pas été payés et une clause contractuelle prévoyait un intérêt de 24 % en plus d’une pénalité de 20 % pour les frais juridiques. La Cour a estimé que ces deux taux d’intérêt ont le même objectif, soit de punir le retard de paiement. Dans les circonstances du dossier, considérant notamment que le créancier n’a vécu aucun préjudice autre que le retard de paiement en tant que tel, la Cour a déclaré les taux d’intérêt cumulés de 24 % et de 20 % abusifs. En conséquence, elle les réduit à un taux total de 15 % en vertu de l’article 1623 du Code civil du Québec. Il est important de noter que cette décision a été prise dans un contexte de contrat d’entreprise. À notre avis, la décision aurait été différente s’il avait été question d’intérêts prévus à un contrat de prêt d’argent, dans lequel l’objet principal du contrat n’est pas un service, mais le prêt lui-même.

Le contexte de signature de la clause peut également nuire à sa validité. En 2013, la Cour du Québec a par exemple refusé d’appliquer un taux d’intérêt de 24 % prévu sur des bons de commande signés par l’acheteur. Un des motifs de décisions était que, selon l’interprétation de la Cour, l’intention de la personne qui signe un bon de commande n’est pas de confirmer une entente sur un taux d’intérêt.1

De plus, la Loi sur l’intérêt2 prévoit que le contrat qui stipule des intérêts supérieurs à 5 % par an doit énoncer expressément le taux d’intérêt calculé annuellement lorsque l’intérêt est payable à un taux ou pourcentage par jour, semaine, mois, ou autre durée inférieure à un an, à l’exception des hypothèques sur immeubles ou biens réels.

Que faire afin d’éviter les mauvaises surprises ?

Nous vous recommandons de communiquer avec l’un de nos professionnels afin d’être accompagnés dans la rédaction et la négociation de vos contrats ainsi que prévenir les difficultés qui peuvent survenir lors de litiges.


1Réfrigération Trottier inc. c. Aliments Ô-Mets-Chinois inc., 2013 QCCQ 13999.

2L.R.C. (1985), ch. I-15.